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Jeu à somme nulle

26 mars 2013

Sur du papier ordinaire...

« La banque ne fait jamais faillite : elle peut mettre en circulation autant d’argent que nécessaire sous forme de reconnaissances de dettes écrites sur du papier ordinaire »: Charles Darrow, l'inventeur du Monopoly, avait tout compris en écrivant la règle de son célèbre jeu. Sa prescience fut d'ailleurs récompensée, puisqu'il devint le premier créateur de jeu millionnaire, à une époque où la rue de la Paix ne valait que 40 000 Francs.

Les banquiers centraux n'ont pas été chercher plus loin la solution à la crise de la dette souveraine et à l'effarante accumulation des dettes, brutes et nettes, des pays développés. Les noms ont changé, les acronymes ont poussé comme des champignons après l'averse, mais, qu'il s'agisse d'ELA, d'OMT, de SMP, de QE ou de POMO, la recette est toujours la même : la banque imprime autant de monnaie qu'elle le veut, sur du papier ordinaire si nécessaire. Le président Obama a d'ailleurs failli prendre au mot son défunt compatriote avec sa célèbre pièce à un trillion de dollars. (Le platine c’est plus chic que le papier.)

Le paradoxe de l'Europe est que, contrairement aux États-Unis, elle se trouve engluée dans une attitude schizophrénique, prise entre la tentation de la planche à billets et l'intransigeance d'une Allemagne qui persiste à invoquer le spectre de la République de Weimar et de ses brouettes de Reichsmarks.

La seconde leçon frappante de cette crise est le recul de l'idéal européen : où est la solidarité quand on réduit un pays de 800 000 habitants à la faillite pour ne pas lui prêter 5 milliards d’euros, une somme certes conséquente mais qui ne représente que 0.5% du budget de l'Union européenne ?

La troisième, la plus inquiétante peut-être, est l'érosion progressive mais indéniable de la démocratie parlementaire. Les décisions sont prises par quelques représentants d'une Troïka, qui porte décidément bien son nom soviétique et dont la réelle expérience financière et économique reste à démontrer. Les règles de droit les plus fondamentales sont également bafouées : expropriation, interdiction des recours en justice, modification rétroactive et unilatérale des contrats, financement des états par la BCE, etc. Tout cela au nom d'une soi-disant urgence (la faillite de Chypre était pourtant inéluctable et annoncée depuis deux ans) et du fameux « risque systémique », le nouveau totem de l'Europe. La confiance ainsi détruite sera très lente à reconstruire. Mais surtout, on ne peut s'empêcher de penser à la phrase de Hoover : « Every collectivist revolution rides in on a Trojan horse of ‘emergency’ »...

Ce sont toutes ces évolutions, et d’autres encore, que ce blog se propose d’explorer, de manière, hélas, irrégulière.

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